Aujourd’hui, 89 % des moins de huit ans ont une interaction régulière avec les écrans, surtout via la tablette et le smartphone. Parents, éducateurs et psychologues s’interrogent sur la meilleure façon de gérer cet usage. Comment gérer leurs temps d’écran ? Quels sont les risques concrets ? Faut-il totalement interdire les écrans ou simplement poser des limites ? Comment expliquer aux jeunes les dangers potentiels d’Internet ?
Depuis le confinement dû au Coronavirus, ces questions sont plus pressantes que jamais. Les écrans n’étaient que des loisirs pour les enfants, et ils deviennent outil de travail ! Les réponses ne sont pas évidentes et les règles à adopter dépendent beaucoup de la famille, du média utilisé et de la personnalité des enfants. Voici néanmoins quelques pistes de réflexion, issues conseils de professionnels et de mon expérience avec mes 4 enfants.
« Digital natives » : l’exposition précoce des enfants au digital
Aujourd’hui, 89 % des enfants de moins de huit ans ont accès aux écrans. Télévision bien sûr, mais aussi utilisation d’un écran interactif, généralement une tablette classique ou le smartphone de leurs parents. Ce n’était pas notre cas quand nous étions enfants : chez moi, la télé n’est arrivée qu’à mes 9 ans, et j’ai eu un ordinateur quand j’ai été étudiante !
Forcément, on se pose des questions, car on ne sait pas les effets des écrans sur le développement du cerveau, ou même sur la vue de nos enfants.
Même si on a une télé, un ou deux ordinateurs, tablettes et smartphones à la maison, ce qui fera la différence de l’exposition précoce de nos enfants au digital, c’est surtout notre utilisation de ces écrans. Est-ce que je suis collée à mon smartphone ? La télé est-elle souvent allumée à la maison ? Est-ce que je joue à la console tous les jours ? A quoi me servent les écrans dans mon quotidien d’adulte ?
Aujourd’hui, 52 % des parents s’avouent accros à leur smartphone. Et ça, c’est seulement ceux qui osent l’avouer !
Personnellement, j’ai choisi de ne pas garder mon smartphone avec moi tout le temps. C’est un outil de travail avant tout, et je ne l’ai pas avec moi lorsque je fais les activités avec les enfants. Il nous sert parfois à regarder des vidéos, ou écouter de la musique…
Et il n’a plus aucun jeu : je me sentais devenir accro et y passer beaucoup plus de temps que ce que j’avais envie d’y passer. Alors hop, Candy crush a été désinstallé !
Jouer : avec ou sans écrans ?
Les jeux sur application comme Candy Crush, Fruit Ninja et Lego Tower représentent l’activité digitale par excellence. Beaucoup d’enfants y jouent, et leur système a tendance à rendre addict assez rapidement ! Ces jeux sont conçus selon un principe de « gamification » qui active le circuit de récompenses du cerveau. Les niveaux sont courts, on gagne souvent, et on a envie de continuer !
Pour autant, c’est la même chose avec d’autres jeux, des jeux réels (en opposition aux « virtuels ». Quand tu joues à un jeu de société avec ton enfant, et qu’il gagne, chaque victoire libère une petite dose de dopamine. Du coup, il est excité et en redemande !
Chez nous, certains jeux de société rendent mes enfants addicts ! On a eu une période Bataille, une autre 1000 bornes, Nain jaune, Splendor… Alors pourquoi un jeu sur écran serait nocif, si le processus est le même que dans les jeux de société ?
La différence réside dans le reste. Dans les jeux de société, on développe le langage, l’expression de nos émotions, la stratégie… Et surtout on échange autour de ça. C’est pour cela qu’on les appelle jeux de société !
Accompagner les temps d’écran
Le vrai danger des écrans, c’est d’être seul devant. Un enfant qui joue seul à un jeu et n’en parle pas ne va pas pouvoir exprimer ses émotions (joie ou frustration par exemple). Il aura accumulé des tensions, notamment visuelles, qu’il aura besoin d’évacuer. C’est pour cela qu’après un dessin animé, ou un jeu sur ordinateur, ton enfant est facilement surexcité !
Regarder avec lui, ou jouer avec lui peut permettre de mieux gérer ses émotions. En parlant de ce qu’on voit et de ce qu’on ressent par exemple. Il m’est déjà arrivé d’arrêter un dessin animé que je pensais adapté, mais que mon fils trouvait beaucoup trop angoissant ! On en a parlé, fait un gros câlin, et on est passé à autre chose…
C’est la même chose avec les jeux de smartphone, tablette, ordinateur, console… Ce n’est pas parce que ce sont des écrans que ton enfant peut y jouer seul. Ensemble, c’est beaucoup plus sympa ! Il peut jouer à côté de toi, et te raconter régulièrement où il en est, tu peux proposer de lui faire un niveau s’il galère… Et tu peux surtout l’aider à prendre conscience de son état de tension. S’il commence à s’agiter, s’énerver, grogner : montre-lui !
C’est comme ça que petit à petit ton enfant apprendra à se connaître et à maîtriser ses temps d’écran !
Quels temps d’écran pour quels enfants ?
La position officielle de l’Académie américaine de pédiatrie est que 1 à 2 heures « d’écrans ludiques » sont acceptables pour les enfants de plus de 2 ans. Une à deux heures ! En France, la règle préconisée par Serge Tisseron est plus stricte. Elle se résume par ces chiffres : 3-6-9-12.
- avant 3 ans : pas d’écran
- pas de console de jeu portable avant 6 ans,
- avant 9 ans : pas d’Internet
- et Internet toujours accompagné jusqu’à 12 ans.
La règle est adaptable selon les familles et la maturité des enfants, bien sûr : il s’agit d’un guide plus que de normes rigides. Mais on est loin des deux heures d’écran par jour à 2 ans !
Personnellement, j’ai testé pas mal de possibilités de temps d’écran avec mes enfants. A la demande, une demi-heure par jour, une heure par jour, trois heures par semaine…
A chaque fois, les modifications on eu lieu suite à des observations :
- comment l’enfant réagit avant et après le temps d’écran
- est-ce qu’il a eu le temps de faire ce qu’il voulait, ce qui était important pour lui ?
- de mon côté, est-ce que c’était bien, ou est-ce que ça me stresse, m’agresse, me soulage ?
- est-ce que j’aimerais partager d’autres choses avec mon enfant, que je ne peux pas partager ?
- est-ce que ça répond à mes valeurs éducatives ?
A chaque changement, on se met d’accord avec les enfants. Chacun peut exprimer son point de vue, ses envies… Les temps d’écran concernent toute le famille !
Donner le bon exemple ?
Si je ne veux pas que mes enfants sautent sur un écran dès qu’ils s’ennuient, il ne faut évidemment pas que je leur montre cet exemple ! Chez moi, les écrans sont surtout des outils. Outils de travail avant tout, mais aussi de connaissances, de culture…
Mais les autres activités non-virtuelles comme la lecture, le sport, ou les loisirs créatifs ont aussi énormément de place. Du coup, on trouve un équilibre assez simplement, même si ça n’a pas toujours été le cas.
Toujours selon Serge Tisseron, « ce ne sont pas les écrans qui sont un problème. C’est la façon dont nous les laissons envahir notre vie par facilité. »
J’avoue qu’il m’est arrivé certaines fois de dire oui pour un dessin animé « hors temps d’écran » pour avoir un moment libre, cool, parce que j’en avais besoin. Et si j’en avais besoin, peut-être que mes enfants aussi ?
S’autoriser à lâcher prise de temps en temps, ça ne fait pas de mal. Le problème, c’est quand ça devient LA solution de facilité. La télé au retour de l’école, le film du soir, le dessin animé du dimanche après-midi, et la console pour faire plaisir… C’est trop.
Les écrans ne sont pas des baby sitter, et ne remplacent pas les jeux en famille. Et puis, s’ennuyer fait aussi beaucoup de bien !
Apprendre avec les écrans ?
Même s’il convient d’encadrer le temps d’écran des enfants, Internet a aussi ses bénéfices. Pour apprendre des langues par exemple, avoir accès à des documents sur des thèmes précis, et pour la culture générale…
Certaines applications proposent une approche à la fois éducative et ludique, pour apprendre par le jeu. C’est le cas des Petits Mandarins, super appli que nous avons testée en famille pour apprendre le chinois !
La difficulté avec Internet, reste que les publicités sont très présentes, et les recherches souvent exprimées de façon peu précise par nos enfants peuvent les amener vers des contenus douteux, voire dangereux.
Bien sûr, il existe des filtres parentaux qui permettent de limiter la casse. Mais parfois, ils limitent aussi drastiquement les résultats des recherches ! Le schéma idéal reste celui où les parents accompagnent leurs enfants sur Internet, pour chaque recherche. Jusqu’à ce que l’enfant soit autonome. Et à chaque fois en aidant l’enfant à développer son esprit critique, en comparant les réponses, en vérifiant les sources…
Utiliser les écrans, et notamment internet, est devenu indispensable aujourd’hui. Cela fait même partie des items du Socle Commun ! A nous de faire en sorte que cela reste une activité parmi d’autres, qui peut être passionnante, mais qui ne remplace pas les autres activités.
Thank you!!1